Législation
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L’Arrêté du 3 mars 2025 relatif aux conditions d’accueil des animaux de compagnie en EHPAD prévu par l’article 26 de la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie1
Dans une précédente Chronique législative de la Revue Semestrielle de Droit Animalier2, la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie3 a été analysée. En particulier, l’article 26 de cette loi a inséré un nouvel article L. 311-9-1 dans le Code de l’action sociale et des familles. Selon cette nouvelle disposition issue de la loi de 2024, sauf avis contraire du conseil de la vie sociale de l’établissement, les établissements accueillant des personnes âgées doivent désormais garantir aux résidents le droit d’accueillir leurs animaux de compagnie, sous réserve de leur capacité à assurer les besoins physiologiques, comportementaux et médicaux de ces animaux et de respecter les conditions d’hygiène et de sécurité définies par arrêté du Ministre chargé des personnes âgées. Ce même arrêté doit également déterminer les catégories d’animaux pouvant être accueillis et peut prévoir des limitations de taille pour chacune de ces catégories.
Ainsi, l’arrêté relatif aux conditions d’accueil des animaux de compagnie en EHPAD prévu par l’article 26 de la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie a été adopté le 3 mars 2025 par la Ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles et la Ministre déléguée auprès de la Ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, chargée de l’autonomie et du handicap. Outre les précisions formellement apportées par ce texte relativement à la mise en œuvre du droit devant être garanti aux résidents concernant l’accueil de leurs animaux de compagnie en EHPAD (I), des interrogations peuvent être formulées quant à son implémentation (II).
I.- Les précisions formellement apportées par l’arrêté du 3 mars 2005 relativement à la mise en œuvre du droit devant être garanti aux résidents concernant l’accueil de leurs animaux de compagnie en EHPAD
Les conditions d’hygiène et de sécurité inhérentes à l’accueil des animaux de compagnie en EHPAD. Selon l’article 1er de l’arrêté du 3 mars 2025 relatif aux conditions d’accueil des animaux de compagnie en EHPAD, les résidents souhaitant accueillir un animal de compagnie doivent :
- produire au moment de leur admission ou de l’arrivée de l’animal un certificat vétérinaire datant de moins de trois mois, établi sur la base des informations portées à la connaissance du vétérinaire et d’un examen de l’animal. Selon l’annexe du texte réglementaire, le certificat vétérinaire doit comporter les mentions suivantes : l’identification de l’animal, les caractéristiques de l’animal (espèce, race le cas échéant, âge, poids et autres signes distinctifs), les vaccinations réalisées le cas échéant, un certificat vétérinaire de stérilisation le cas échéant, les traitements et les soins requis le cas échéant, ainsi que la non-dangerosité et la capacité à cohabiter de l’animal ;
- assurer et prendre en charge les soins vétérinaires requis par l’état de santé de l’animal ;
- veiller à l’absence de comportement dangereux de l’animal, y compris dans les espaces privatifs ;
- respecter les règles, fixées par le directeur de l’établissement pour assurer l’hygiène, la sécurité des personnels et résidents, ou la tranquillité des résidents, et relatives aux espaces soumis à des interdictions ou des restrictions d’accès pour les animaux ;
- fournir et mettre à disposition de l’établissement le matériel permettant de contenir l’animal en tant que de besoin ;
- fournir en permanence un accès à une eau propre et potable, renouvelée autant que de besoin, dans un récipient que le résident tient propre ;
- prendre en charge la nourriture adaptée aux besoins de l’animal ;
- fournir les soins quotidiens permettant d’assurer le bien-être de l’animal.
Ces conditions d’hygiène et de sécurité posées par l’arrêté de 2025 semblent évidentes et justifiées. De plus, il apparaît tout à fait pertinent et opportun qu’au-delà des seules conditions inhérentes à l’hygiène et à la sécurité stricto sensu, les besoins et le bien-être de l’animal soient également pris en compte dans la définition des conditions liées à l’accueil d’un animal de compagnie au sein d’un EHPAD. L’arrêté de 2025 ne semble d’ailleurs pas se limiter à définir strictement les seules conditions d’hygiène et de sécurité à respecter, mais renvoie également à la capacité des résidents à assurer les besoins physiologiques, comportementaux et médicaux de leurs animaux, expressément mentionnés par l’article 26 de la loi du 8 avril 2024, ainsi qu’à leur bien-être.
Les catégories d’animaux de compagnie exclus de l’accueil en EHPAD. L’article 2 de l’arrêté du 3 mars 2025 prévoit que les animaux mentionnés à l’article L. 211-12 du Code rural et de la pêche ne peuvent pas être accueillis en EHPAD. Il s’agit des « chiens susceptibles d’être dangereux ». Ceux-ci sont répartis par la loi en deux catégories, la liste des types de chiens relevant de chacune de ces deux catégories étant fixée par un arrêté du Ministre de l’Intérieur et du Ministre de l’Agriculture4. Les deux catégories de « chiens susceptibles d’être dangereux » sont ici visées. En conséquence, les « chiens d’attaque », qui relèvent de la première catégorie, ainsi que les « chiens de garde et de défense », qui relèvent de la seconde catégorie, ne peuvent pas être accueillis en EHPAD. Seules ces exclusions sont posées par l’arrêté de 2025. Celles-ci peuvent paraître conformes à la réglementation applicable aux « chiens susceptibles d’être dangereux », qui comporte toute une série de mesures spécifiques posées par les articles L. 211-11 et suivants du Code rural et de la pêche maritime, parmi lesquelles figurent notamment l’interdiction, la restriction ou l’encadrement – selon la catégorie des « chiens susceptibles d’être dangereux » concernée – de l’accès aux transports en commun et aux lieux publics et du stationnement dans les parties communes des immeubles collectifs5.
En outre, il peut être observé que l’arrêté du 3 mars 2025 ne définit pas de limitations de taille pour chacune des catégories d’animaux pouvant être accueillis en EHPAD, comme l’y « invitait » la loi du 8 avril 2024, en ouvrant la possibilité de le faire – « Ce même arrêté […] peut prévoir » –, sans poser toutefois d’« obligation » sur ce point.
II.- Les interrogations pouvant être formulées relativement à l’implémentation du droit devant être garanti aux résidents des établissements accueillant des personnes âgées concernant l’accueil de leurs animaux de compagnie
Quant à l’appréciation des catégories d’animaux pouvant être accueillis en EHPAD ? Sur la base, d’une part, des exclusions posées par l’arrêté du 3 mars 2025, qui se limitent aux « chiens susceptibles d’être dangereux » et, d’autre part, de l’absence de limitations de taille pour chacune des catégories d’animaux pouvant être accueillis, il semble que des questions qui avaient déjà été précédemment formulées relativement aux dispositions issues de la loi du 8 avril 20246, concernant les « contours » ou les « limites » à entendre et à comprendre pour la notion d’« animaux de compagnie » dans le cadre de l’application du droit nouveau garanti aux résidents des établissements qui accueillent des personnes âgées, demeurent en suspens, en particulier dans l’hypothèse où des animaux « exotiques », voire « originaux », seraient les « compagnons » d’une personne âgée et détenus par elle pour son agrément.
La limitation des exclusions expressément posées par l’arrêté de 2025 concernant les catégories d’animaux pouvant être accueillis en EHPAD peut être saluée, tant à l’égard des personnes âgées propriétaires d’animaux de compagnie qu’à l’égard des animaux de compagnie détenus par des personnes âgées.
Néanmoins, outre les « chiens susceptibles d’être dangereux » relevant de la première et de la seconde catégorie, qui sont expressément exclus de l’application du droit nouveau garanti aux résidents des établissements qui accueillent des personnes âgées, qu’en est-il, en pratique, de l’appréciation des autres catégories d’animaux qui peuvent être accueillis en EHPAD ? Celle-ci relève-t-elle de l’appréciation discrétionnaire de chaque établissement concerné ? Ou bien le droit d’accueillir en EHPAD tous les animaux de compagnie autres que les « chiens susceptibles d’être dangereux » doit-il être garanti, sous réserve, évidemment, de remplir les autres conditions posées par les textes, notamment la capacité à assurer les besoins physiologiques, comportementaux et médicaux des animaux, ainsi que le respect des conditions d’hygiène et de sécurité ? Autrement dit, l’exclusion posée par l’arrêté de 2025 relativement aux catégories d’animaux pouvant être accueillis en EHPAD doit-être elle entendue et interprétée comme étant stricte et exhaustive, ou bien d’autres exclusions additionnelles peuvent-elles être décidées de façon discrétionnaire par chaque établissement concerné ? Concrètement, il convient de rappeler qu’en application de l’article L. 311-9-1 du Code de l’action sociale et des familles inséré par l’article 26 de la loi du 8 avril 2024, l’avis contraire du conseil de la vie sociale de l’établissement peut « écarter » la garantie du droit nouvellement reconnu aux résidents des établissements qui accueillent des personnes âgées à l’accueil de leurs animaux de compagnie.
Quant au sort de l’animal accueilli en EHPAD en cas d’inaptitude de son propriétaire à respecter les conditions posées par les textes ? Comme précédemment relevé, des conditions d’hygiène et de sécurité, incluant également la prise en compte des besoins et du bien-être de l’animal, sont explicitement posées par l’arrêté de 2025 quant à l’accueil des animaux de compagnie en EHPAD.
Des interrogations concrètes peuvent alors être soulevées. Qu’advient-il de l’animal ou des animaux concerné(s) dans l’hypothèse où la personne âgée deviendrait soudainement inapte à s’occuper de son animal en raison de la dégradation de son état de santé et/ou subitement inapte à assurer et à prendre en charge financièrement les soins vétérinaires requis par l’état de santé de son animal ou la nourriture adaptée aux besoins de son animal et/ou inapte à fournir les soins quotidiens permettant d’assurer le bien-être de son animal ? Autrement dit, qu’advient-il de l’animal lorsque les conditions de l’accueil de celui-ci en EHPAD, expressément posées par les textes, ne sont plus respectées ? Qu’en est-il en cas d’inaptitude définitive de la personne propriétaire de l’animal, mais aussi en cas d’inaptitude seulement temporaire de celle-ci, par exemple dans l’hypothèse d’une maladie ou d’une infirmité impermanente ? Quelles procédures doivent alors être suivies ? Quelles décisions peuvent être prises ? Qui décide ? Les mêmes questions peuvent – évidemment – également se poser dans l’hypothèse du décès de la personne propriétaire de l’animal.
En pratique, il est permis d’imaginer que les réponses à ces questions seront apportées par le règlement d’ordre intérieur de l’établissement. Cependant, comme le rappelle l’article 515-14 du Code civil, les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Leur qualité d’êtres vivants et sensibles confère une importance et une portée particulières à ces questions et aux réponses qui doivent leur être apportées.
Quant aux établissements concernés par la garantie à leurs résidents du droit d’accueillir leurs animaux de compagnie ? Enfin, il peut être relevé que la loi du 8 avril 2024 ne distingue pas selon le type d’établissement qui accueille des personnes âgées, relativement au droit d’accueillir leurs animaux de compagnie devant être garanti aux résidents par ces établissements. En effet, l’article 26 de la loi du 8 avril 2024 renvoie expressément aux établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du Code de l’action sociale et des familles. Or, cette disposition se réfère très largement aux « établissements et [aux] services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale ».
Les EHPAD, explicitement visés par l’intitulé de l’arrêté du 3 mars 2025, se définissent comme des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Ainsi, en pratique, la notion d’« EHPAD » ne recouvre pas la totalité des établissements qui accueillent des personnes âgées. A titre d’exemple, il existe également les résidences autonomie, qui sont destinées à accueillir dans un logement des personnes âgées majoritairement autonomes qui ne peuvent plus ou qui n’ont plus l’envie de vivre chez elles.
Aussi, pourquoi l’arrêté du 3 mars 2025 se réfère-t-il uniquement aux seuls EHPAD dans son intitulé et ne vise-t-il pas, plus largement, tous les établissements qui accueillent des personnes âgées visés au 6° du I de l’article L. 312-1 du Code de l’action sociale et des familles ? S’agit-il d’une « erreur » dans le choix des termes de l’intitulé du texte, alors même que le corps du texte de l’arrêté renvoie expressément aux établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du Code de l’action sociale et des familles ? Ou bien ce texte ne vise-t-il effectivement que les EHPAD et devrait le cas échéant être complété par un autre ou par d’autres textes, de façon à réglementer tous les établissements et services qui accueillent des personnes âgées, explicitement visés par la loi du 8 avril 2024 et concernés par la garantie aux résidents du droit d’accueillir leurs animaux de compagnie ?
Jordane SEGURA-CARISSIMI
La Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au bien-être des chiens et des chats et à leur traçabilité
Une proposition de Règlement a été faite par le Commission européenne le 7 décembre 2023 (COM(2023) 769 final 2023/0447(COD)). Ce texte fait suite à plusieurs résolutions adoptées par le Parlement européen7 ainsi qu’à l’étude de la Commission de 2015 sur le bien-être des chats et des chiens impliqués dans des pratiques commerciales8. Il vise également à prendre en compte la récente étude scientifique de l’EFSA sur le bien-être des chiens et des chats dans les élevages9. Par ailleurs, en même temps que ce texte, une proposition de règlement visant à réviser le règlement relatif à la protection des animaux pendant le transport avait été proposée10.
Cette proposition de règlement a pour ambition de :
garantir des normes minimales communes en matière de bien-être des animaux pour l’élevage, la détention et la mise sur le marché de chiens et de chats élevés ou détenus dans des établissements ;
améliorer la traçabilité des chiens et des chats mis sur le marché de l’Union ou cédés, y compris lorsqu’ils sont proposés à la vente ou à l’adoption en ligne ;
garantir des conditions de concurrence équitables entre les opérateurs qui détiennent et mettent sur le marché des chiens et des chats à travers l’Union ;
promouvoir la compétence des soigneurs animaliers ; et
compléter les règles existantes en matière d’importation de chiens et de chats.
En particulier, ce règlement viendrait préciser certaines dispositions de la législation européenne sur la santé animale11.
Au-delà de ces objectifs, la proposition établit des exigences minimales en matière de bien-être des animaux en ce qui concerne l’élevage, la détention et la mise sur le marché de l’Union de chiens et de chats. Entre autres, la proposition de règlement souhaite mieux prendre en compte le marché en ligne des chiens et des chats, incluant le cas des refuges.
Ce type de propositions législatives devrait en principe être chaleureusement accueilli par les défenseurs de la cause animale, car l’on se souvient des années pendant lesquelles la Commission était strictement réfractaire à tout texte touchant au bien-être d’animaux n’entrant pas dans la chaîne alimentaire. Le principe de subsidiarité était ainsi régulièrement invoqué, souvent à tort. C’est donc incontestablement un progrès de voir une telle proposition aujourd’hui. Pour autant, une inquiétude demeure : ne serait-ce pas un texte en trop ? En effet, les mouvements de chiens et de chats sont déjà règlementés par le Règlement (UE) 576/201312, le Règlement (UE) 2016/42913 et le Règlement (UE) 1/200514 (en cours de révision). La législation santé animale prévoit notamment la possibilité pour la Commission d’adopter des règlements délégués et d’exécution afin de préciser certaines parties. Ne serait-ce pas plus efficace de passer par ces instruments plutôt que d’adopter une nouvelle législation ? L’abondance de textes ne risque-t-elle pas de créer un flou juridique ?
Ces craintes semblent notamment se justifier à la lecture du champ d’application et des définitions données par cette proposition : désormais à côté du mouvement « commercial » et « non-commercial » des animaux de compagnie, déjà difficile à appliquer, s’ajoute les notions de « chiens et chats mis sur le marché »15 ainsi que de « cession »16. À la lecture notamment de la définition de la « cession », l’on comprend toute la difficulté d’application dans les exceptions qu’elle propose : « à l’exclusion des cessions occasionnelles de chiens ou de chats, par des personnes physiques, effectuées par d’autres moyens que par l’intermédiaire d’une plateforme en ligne; ».
En outre, alors que la législation sur la santé animale avait à l’époque de sa proposition fait bondir les ONG en incluant dans sa définition de « l’animal sauvage » les chiens et les chats sans maître, cette nouvelle proposition restreint désormais les notions de « chienne »17 et « chatte »18 aux animaux ayant été saillies et ce jusqu’à la dernière portée produite.
Enfin, les notions d’ « établissement » de la législation de santé animale et celle de cette nouvelle proposition semblent être en complète contradiction :
Dans la proposition19 :
«établissements»: les établissements d’élevage, les refuges pour animaux et les animaleries ;
«établissement d’élevage»: tout local ou toute structure, y compris les foyers, dans lequel des chiens et des chats sont détenus à des fins de reproduction en vue de la mise sur le marché de leur progéniture ;
Dans la législation santé animale20 :
«établissement», tout local, toute structure ou, dans le cas de l'agriculture de plein air, tout milieu ou lieu dans lequel sont détenus des animaux ou des produits germinaux, à titre temporaire ou permanent, à l'exclusion :
- a) des habitations où sont détenus des animaux de compagnie ;
- b) des cabinets ou cliniques vétérinaires ;»
La proposition législative a été présentée comme celle qui rendra l’identification et l’enregistrement des chiens et des chats obligatoires. Or, cette obligation existait déjà dans la législation sur la santé animale21. De manière complétement contradictoire, des amendements ont été proposés au sein de la Commission AGRI du Parlement européen, qui réduirait le champ de l’obligation d’identification et d’enregistrement des chiens et des chats.
Le 6 juin 2025, le vote a eu lieu au sein de ce comité. Le rapport est désormais prévu à l’ordre du jour de la plénière pour la première lecture22. S’il est adopté, les négociations avec les ministres des États membres débuteront (le trilogue).
Sophie DUTHOIT-LULOV
Le Décret n° 2024-1153 du 4 décembre 2024 relatif à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques et modifiant le code rural et de la pêche maritime23.
« Cher (indispensable ?) animal de laboratoire… »
Depuis longtemps, les animaux sont utilisés au sein de procédures expérimentales dans les laboratoires, en dépit d’un vaste mouvement qui souhaite l’interdiction de ces pratiques. Il n’existe malheureusement pas d’alternative au vivant pour certains essais scientifiques. L’article R 214-90 du Code rural et la pêche maritime fixe les contions requises pour l’utilisation de ces animaux qui sont au nombre de trois : l’espèce animal en question doit figurer sur une liste fixée par arrêté ministériel, l’animal doit avoir été élevé exclusivement à cette fin, et l’animal doit provenir d’éleveurs ou de fournisseurs agréés (qu’ils soient européens ou hors Union européenne).
Si la souris blanche est le représentant le plus emblématique des animaux de laboratoire, elle ne constitue pas la seule espèce utilisée. Les primates constituent en effet des animaux de choix, de par leur proximité génétique avec l’être humain. Le décret n° 2024-1153 du 4 décembre 2024, texte particulièrement court (trois articles), modifie le Code rural en permettant l’utilisation de primates de première génération élevés à des fins scientifiques dans des procédures expérimentales. La nuance est subtile, le quatrième alinéa de l’article R. 214-90 étant à peine modifié : « les primates sont issus d'animaux élevés [et non plus d’élevages, ndlr] en captivité ou de colonies entretenues sans apport d'effectifs extérieurs ».
La notice explicative du texte indique qu’il s’agit de la mise en conformité (tardive) de la loi nationale avec la directive européenne sur la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques24, directive bien connue pour avoir mis en place la règle dites des « trois R » (remplacement, réduction et raffinement de l’utilisation des animaux de laboratoire). La réalité est sans doute bien différente, et il faut davantage y voir une régularisation de l’utilisation de certains primates -non concernés par le code auparavant- sous la pression des industriels.
Le décret créé par ailleurs l’article R. 214-138 nouveau dans le Code rural et de la pêche maritime destiné à déclarer démissionnaires d’office les membres de la Commission nationale pour la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques et ceux du Comité national de réflexion éthique sur l'expérimentation animale, lorsque ceux-ci sont absents de manière répétée ou trois fois de manière consécutive sans motif valable. En effet, ils sont tenus d'assister personnellement aux séances ou d'y être suppléés. Cette modification, purement technique, traduit toutefois une réalité malheureuse : certains membres de ces commissions recherchent davantage une ligne supplémentaire sur leur CV que la protection des animaux de laboratoire.
C’est peut-être ce qui a motivé le dépôt de la proposition de loi n° 1294 déposée le 17 avril 2025 par le député Aymeric Caron, de la France insoumise, qui vise le droit à l’objection de conscience à l’expérimentation animale pour les étudiants et à encourager la réduction du nombre d’animaux utilisés dans la recherche et l’enseignement.
Cette proposition de loi dans son exposé des motifs dresse de manière détaillée le portrait de la situation française en termes d’utilisation d’animaux de laboratoire : la France est championne en la matière, et la directive européenne de 2010 apparaît comme un coup d’épée dans l’eau. Aymeric Caron souhaite inclure dans le texte de loi des objectifs chiffrés et atteignables (diminution de 50 % des animaux d’ici le 31 décembre 2050). Elle propose en outre d’élargir le panel des membres des comités d’éthique en expérimentation animale afin d’inclure des experts en droit animalier, en analyses statistiques, ou encore en éthologie (article 1 et 2).
Il propose la création d’une très innovante clause de conscience à destination des étudiants, stagiaires, apprentis, ou élèves de la formation professionnelle lorsqu’ils sont confrontés à un acte d’expérimentation animale : ils pourraient alors refuser de pratiquer ou de concourir à un tel acte (article 3).
Enfin, un droit à un repos bien mérité (la proposition de loi parle de « droit à la retraite », article 4) est reconnu à tout animal utilisé à des fins scientifiques ou éducatives. L’objectif est que l’animal puisse bénéficier d’une continuité de vie sereine et adaptée aux besoins physiologiques de son espèce après sa vie dans les laboratoires. La charge matérielle et financière de cette retraite reposerait sur les laboratoires.
Il conviendra de suivre l’évolution parlementaire de ce texte dont les ambitions sont loin d’être inintéressantes.
Matthias MARTIN
Le Décret n° 2025-396 du 30 avril 2025 relatif à l'accompagnement financier des établissements itinérants de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques25.
« À votr’ bon cœur ! Une petite pièce pour compenser le lion que j’ai perdu ! »
Plus de trois ans après l’adoption de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes26, les décrets d’application continuent d’être adoptés les uns après les autres afin de rendre applicables les différentes mesures adoptées. Parmi les mesures phares de la loi, l’interdiction des animaux sauvages dans les cirques, ou -pour reprendre les mots de la loi - la fin de la captivité d’espèces non domestiques utilisées à des fins commerciales dans les établissements itinérants, avait particulièrement retenu l’attention du grand public. Les éléphants à quatre pattes sur des tabourets et les tigres au travers de cerceaux enflammés allaient définitivement appartenir au passé. Cette mesure a été codifiée aux articles L. 413-9 et suivants du Code de l’environnement.
L’interdiction est particulièrement extensive : non seulement elle concerne absolument tous les animaux sauvages sans exception, y compris des hybrides qui pourraient ainsi échapper à la qualification légale27, mais aussi tout mode de détention (« Il est interdit d'acquérir, de commercialiser et de faire se reproduire des animaux appartenant aux espèces non domestiques […] »28 sans oublier « la détention, le transport et les spectacles » desdits animaux29), ainsi que tout type d’établissements itinérants, et même plus, les discothèques étant également visées30. Des délais d’application sont prévus : deux ans pour l’interdiction d’acquisition, de commercialisation et de reproduction des animaux (il fallait prévoir le cas où des femelles étaient en gestation), et sept ans pour la détention et la présentation des animaux sauvages (soit le 1er décembre 2028), ce dernier délai étant nécessairement plus long pour laisser le temps aux cirques de trouver des solutions d’accueil pour les animaux.
Mettre en place une interdiction de détention d’animaux sauvages afin de favoriser le bien-être animal ne reste néanmoins qu’un vœux pieu en l’absence de mesures concrètes d’accompagnement des propriétaires. L’échec du sort des cétacés du Marineland d’Antibes (entre un délai d’application de la loi vraiment trop court et des exigences dantesques d’adaptation des bassins31) a visiblement servi de leçon au législateur qui a donc prévu par le présent décret du 30 avril 202532 un plan d'accompagnement financier pour les établissements itinérants de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques. Il s’agit d’aides étatiques, dérogatoires33 et temporaires, afin d’assurer la transition de cirques traditionnels à des cirques wild-free.
Cinq mesures financières sont prévues34 afin de permettre la reconversion professionnelle des établissements concernés et de leurs personnels :
1/ Une aide à la transition économique des entreprises à travers le développement de nouvelles activités ;
2/ Une aide à la reconversion des personnels détenteurs d'un certificat de capacité de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques, qui doivent alors s’engager à abandonner leur ancienne activité professionnelle ;
3/ Une aide pour les établissements ayant procédé à la mise au repos de leur animaux sauvages (c’est-à-dire qu’ils ont déjà cédé à titre gratuit leurs animaux à un refuge ou à un zoo fixe depuis l’adoption de la loi de 2021) ;
4/ Une aide pour les établissements à l'entretien et au nourrissage des animaux sauvages dans l'attente -par manque de place- de leur placement en structure fixe, preuve de la démarche à l’appui ;
5/ et enfin, une aide à la stérilisation des fauves35 détenus par ces établissements, afin d’éviter une reproduction naturelle désormais interdite depuis la loi de 2021.
De manière concrète, c’est l'Agence de services et de paiement qui instruit les différentes demandes d’aides (à l’exception de la stérilisation36), ainsi que les recours et contestations afférents37. La procédure se fait classiquement en ligne, via un guichet unique. L’Agence de service et de paiement est aussi en charge du versement des aides et du contrôle de celles-ci en cas de fraude. Le décret définit de manière précise les conditions requises pour bénéficier de chacune des cinq aides ; le point commun étant que l’établissement doit agir de manière pro-active et honnête. Ainsi, l’animal sauvage doit nécessairement être enregistré dans un des fichiers nationaux d'identification38, l’établissement doit disposer d’un numéro SIREN et des différentes autorisations nécessaires à son activité, la situation fiscale doit être à jour, etc. L’idée est de ne pas transformer ces aides en un business mafieux de transfert d’animaux sauvages.
Deux remarques d’ordre général sont à faire. D’une part, ces aides allouées par l’État sont importantes39 : la première mesure jouit d’un montant forfaitaire de 100 000 € par établissement ; la deuxième mesure d’un montant de 100 à 150 000 € selon le nombre d’espèces animales différentes dont pouvait s’occuper le dresseur ; la troisième mesure oscille entre 1000 € (pour un python par exemple) et 50 000 € (pour un éléphant) selon l’animal « perdu » par le cirque, dans la limite de 200 000 € ; la quatrième mesure est de 600 € par mois pour l’entretien d’un gros animal sauvage (60 € pour les « petits ») ; et la cinquième mesure est de 2000 € par animal. L’ensemble de ces aides ne peut pas excéder 300 000 € par établissement40. Si cette somme est sans doute un peu faible pour les plus gros cirques, elle permet toutefois d’apporter un vrai soutien aux plus petites structures qui n’ont pas nécessairement les moyens d’assurer seules cette reconversion forcée. D’autre part, les établissements itinérants présentant au public exclusivement des oiseaux ne font pas partie des établissements éligibles. C’est une exception que nous ne nous expliquons pas pour le moment. Sans doute la reconversion est-elle jugée plus facile et l’impact financier moindre que pour les cirques avec des fauves.
Matthias MARTIN
Les arrêtés du 24 mars 2025 portant création, modification ou approbation des plans de gestions des réserves biologiques de la Confluence Ill-Rhin (Bas-Rhin), de la Haute Chaume (Oise), de Lacanau (Gironde), de la Sainte-Baume (Var), du Stampfthal (Bas-Rhin) et du Hochfeld (Bas-Rhin)41.
Le classement de certains territoires en réserves biologiques est un mécanisme peu connu de protection de certains espaces naturels, et donc des animaux sauvages qui y vivent. Ce régime date pourtant des années 1950. Les réserves biologiques sont des espaces relevant du régime forestier, classés volontairement par l'Office National des Forêts (ONF) sous un statut de protection.
Contrairement aux réserves naturelles nationales ou régionales qui peuvent concerner tous types de propriétés (privées comme publiques, sur terre comme en mer), les réserves biologiques sont un statut de protection spécifique aux espaces relevant du régime forestier, c’est-à-dire les forêts du domaine public qu’il s’agisse de l'État (forêts domaniales) ou des forêts des collectivités ou d'établissements publics (communes, départements, Conservatoire du littoral…). C’est ce qui explique également la différence de gestion des deux régimes : alors que la gestion des réserves naturelles est confiée à des associations, à des établissements publics ou à des collectivités territoriales, les réserves biologiques sont quant à elles gérées par l'Office National des Forêts (ONF).
Les réserves biologiques relèvent de l’article L. 212-2-1 du Code Forestier et sont créées par arrêté conjoint des ministres chargés de la forêt et de l'environnement, après avis du Conseil national de la protection de la nature, puis accord de la collectivité ou de la personne morale intéressée lorsque tout ou partie des bois et forêts concernés appartient à une collectivité ou à une personne morale.
Les réserves biologiques prévoient un statut de protection du milieu naturel en fonction d’objectifs de conservation, visant notamment à réguler les activités humaines, soit en les interdisant, soit en les soumettant à des conditions particulières afin d’éviter qu’elles puissent compromettre la réalisation des objectifs fixés.
Il existe deux types de réserves biologiques : les réserves biologiques dirigées et les réserves biologiques intégrales.
Les réserves biologiques dirigées (RBD) reposent sur des objectifs de gestion conservatoire spécifique. Ainsi, la gestion est interventionniste et ciblée sur des enjeux patrimoniaux forts, comme la création ou l’entretien de milieux ouverts, la réalisation de travaux de gestion hydraulique (pour maintenir ou restaurer des zones humides), la lutte contre des espèces exotiques envahissantes, etc… Le plus souvent, les RBD protègent des milieux ouverts comme les landes ou les tourbières, qui risqueraient de subir une fermeture ou une régression du fait du développement naturel de la végétation arbustive ou arborescente. Ces réserves concernent une très grande diversité de milieux, depuis les espaces littoraux jusqu'aux pelouses alpines. Les RBD sont reconnues comme espaces protégés de catégorie 4 par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
Les réserves biologiques intégrales (RBI) sont quant à elles consacrées à la libre évolution des forêts. A l'opposé des réserves biologiques dirigées et de leur gestion active, les RBI favorisent une gestion passive de ces espaces et une restriction des interventions humaines. L’objectif principal de ces réserves est de pouvoir disposer d’observatoires de la dynamique naturelle de ces forêts sur le long terme, notamment dans le contexte du changement climatique. Elles constituent également des conservatoires d'une biodiversité particulière qui est plus rare que dans les forêts exploitées (insectes et champignons liés au bois mort...). Les RBI sont reconnues comme espaces protégés de catégorie 1 par l'UICN.
Si les RBI constituent des terrains d’études privilégiés pour les naturalistes et scientifiques, d’autres activités humaines y sont également autorisées sous certaines conditions. En effet, l’objectif n’est pas de soustraire ces territoires au public mais au contraire de prévoir des modalités d'accueil du public compatibles avec les enjeux de préservation. Parmi les activités admises sont ainsi prévues notamment la sécurisation de voies longeant ou traversant les réserves (sentiers pédestres balisés, chemins, routes), l'élimination d'espèces végétales ou animales allochtones, la régulation des ongulés par la chasse en l'absence de prédateurs afin d'éviter le déséquilibre des écosystèmes, certaines actions de gestion des risques naturels, etc.
Dans l'Hexagone comme dans les départements et régions d'outre-mer, les réserves biologiques offrent un statut de protection fort, contribuant à la Stratégie nationale aires protégées (SNAP) 2020-2030. La France compte plus de 250 réserves biologiques représentant en tout 145 708 ha de forêt dont 58 809 ha en France métropolitaine et 86 899 ha en outre-mer. La plus grande réserve biologique intégrale se trouve en Guyane et dépasse 60 000 hectares.
Le développement du réseau des réserves biologiques se poursuit au rythme de cinq créations par an, auxquelles s'ajoutent régulièrement des extensions de réserves existantes. C’est ainsi que plusieurs arrêtés du 24 mars 2025 sont venus créer ou modifier certaines réserves biologiques.
Ainsi l’Arrêté du 24 mars 2025 portant création de la réserve biologique dirigée (RBD) de la Haute Chaume (Oise) et approbation de son premier plan de gestion (JORF n° 0075 du 28 mars 2025) crée la réserve biologique dirigée (RBD) de la Haute Chaume, d'une superficie de 130,96 ha, en forêt domaniale d'Ermenonville sur les communes d'Ermenonville et de Fontaine-Chaalis, dans le département de l'Oise.
L’Arrêté du 24 mars 2025 portant modification de la réserve biologique de la Confluence Ill-Rhin (Bas-Rhin) et approbation de son plan de gestion (JORF n° 0075 du 28 mars 2025) vient agrandir la réserve biologique de La Wantzenau dans le département du Bas-Rhin, portant la surface de la réserve biologique de 52,64 ha à 103,43 ha, dont 70,41 ha en forêt communale de La Wantzenau et 33,02 ha en forêt domaniale de Honau. Cette modification a pour conséquence un changement de nom de la réserve qui portera dorénavant le nom de réserve biologique de la Confluence Ill-Rhin. Cette réserve est mixte. Elle est pour partie une réserve biologique intégrale (43.23 ha), ayant pour objectif de permettre la libre expression des processus d'évolution naturelle d'écosystèmes forestiers représentatifs de la bande rhénane, à des fins d'accroissement et de préservation de la naturalité forestière et de la diversité biologique associée, et de développement des connaissances scientifiques. Elle est également pour une autre partie une réserve biologique dirigée (60,2 ha) ayant pour objectif de garantir la conservation de milieux rivulaires et de milieux ouverts, l'accroissement et la préservation de la matrice forestière, ainsi que la conservation d'espèces remarquables, en assurant notamment la quiétude d'espèces animales sensibles.
L’Arrêté du 24 mars 2025 portant modification de la réserve biologique de la Sainte-Baume (Var) et approbation de son plan de gestion (JORF n° 0075 du 28 mars 2025) vient à la fois agrandir la réserve biologique en portant sa surface de 138,32 ha à 488,3 ha et changer la nature de la réserve qui était jusqu’à présent une RBD et devient une réserve mixte comprenant 429,37 ha de réserve biologique intégrale et 58,93 ha de réserve biologique dirigée. L 'objectif principal de la RBI est la libre expression des processus d'évolution naturelle d'écosystèmes forestiers représentatifs du massif de la Sainte-Baume depuis l'étage méso-méditerranéen jusqu'à l'étage montagnard, à des fins d'accroissement et de préservation de la naturalité forestière et de la diversité biologique associée, ainsi que de développement des connaissances scientifiques (art. 3).
L’Arrêté du 24 mars 2025 portant modification de la réserve biologique dirigée (RBD) de Lacanau (Gironde) et approbation de son plan de gestion (JORF n° 0075 du 28 mars 2025) vient également agrandir la surface de la réserve biologique dirigée en le portant de de 216,35 ha à 262,88 ha, ce qui a également pour conséquence un changement de nom de la réserve auparavant dénommée « réserve biologique dirigée de Vire Vieille, Vignotte et Batejin en forêt domaniale de Lacanau, en forêt départementale de Vignotte et en forêt du Conservatoire du littoral de Vire Vieille sur la commune de Lacanau » et désormais simplement nommée réserve biologique dirigée de Lacanau.
Toutes les réserves mettent en place des mesures restrictives aux activités humaines en prévoyant des dérogations. En ce qui concerne les animaux, elles prévoient généralement que toute introduction d'espèces végétales ou d'espèces animales non domestiques est interdite. Elles interdisent également la chasse et la pêche, à l'exception de la régulation des populations d'ongulés. En complément, elles interdisent tout agrainage, affouragement ou dispositif d'attraction du gibier tant dans la réserve que dans les parcelles de sa zone de transition. La destruction d'espèces animales susceptibles d'occasionner des dégâts telles que définies par l'article R. 427-6 du Code de l'environnement est aussi interdite, à l'exception, le cas échéant, d'espèces exotiques envahissantes ou d'ongulés. La régulation des populations d'ongulés par la chasse est autorisée afin d'éviter le déséquilibre des écosystèmes. Les modalités de cette régulation sont fixées par l'ONF. Une disposition spécifique pour la chasse à courre est prévue pour la réserve biologique de la Haute Chaume (Oise) : l'attaque est interdite dans la réserve et les parcelles de sa zone de transition mais il y a possibilité de suite pour les chiens accompagnés par deux veneurs à pied ou à cheval. Enfin, généralement les réserves biologiques interdisent la divagation des chiens y compris les chiens de chasse et n’autorisent les chiens que sur les itinéraires balisés, à condition qu’ils soient tenus en laisse.
L’objectif de ces réserves est donc de permettre un équilibre entre la protection de ces espaces naturels remarquables et les activités humaines. Ces réserves sont pensées comme des vitrines de ce que la nature peut nous offrir de meilleur et nous invitent à repenser notre relation à celle-ci en permettant à chaque citoyen d'avoir accès à une nature préservée près de chez lui. On ne pourra donc que se féliciter de l’ampleur grandissante ce ces réserves !
Lucille BOISSEAU
En Bref…
La Proposition de Directive Du Parlement Européen et du Conseil modifiant la directive 92/43/CEE du Conseil en ce qui concerne le statut de protection du loup (Canis lupus)42.
Le 6 décembre 2024, le comité permanent de la convention de Berne a adopté la proposition de l’Union européenne visant à modifier le statut de protection du loup (Canis lupus) en retirant l’espèce de l’annexe II (espèces de faune strictement protégées) et en l’ajoutant à l'annexe III (espèces de faune protégées).
Le changement est entré en vigueur le 7 mars 2025. Faisant suite à cela, la Commission européenne a soumis le même jour, une proposition de Directive visant à réduire le statut de protection du loup dans l’Union européenne. Le loup passe ainsi de l’annexe IV de la Directive 92/43/CEE (Directive Natura 2000)43 à l’annexe V. Désormais, le loup ne fait donc plus partie des espèces nécessitant une « protection stricte », mais de celles « dont le prélèvement dans la nature et l’exploitation sont susceptibles de faire l’objet de mesures de gestion ». Concrètement cela signifie que désormais l’interdiction de tuer intentionnellement un loup ne s’appliquera plus, et que les Etats membres seront libres d’adopter des règles quant à la « gestion » des populations de loups.
La Commission a réussi ainsi à faire voter le texte par le parlement européen deux mois après l’avoir soumis, le 8 mai 2025, en utilisant la procédure d’urgence. Le texte est désormais dans les mains du Conseil, qui l’a en réalité déjà validé. Les Etats auront 18 mois pour se conformer aux nouvelles règles.
Sophie DUTHOIT-LULOV
La Proposition de loi n° 1299 visant à interdire les euthanasies dites de convenance des chiens et des chats, déposée le 17 avril 2025
« Je t’aime à (te faire ?) mourir. »
Le député Aymeric Caron a été très actif le 17 avril 2025 : parmi les cinq différentes propositions de lois qu’il a déposées (« Abolir la corrida : un petit pas pour l’animal, un grand pas pour l’humanité, n° 1292 ; « Interdire l’élevage de poulpes sur le territoire français », n° 1293 ; « Droit à l’objection de conscience à l’expérimentation animale pour les étudiants et encouragement à la réduction du nombre d’animaux utilisés dans la recherche et l’enseignement », n° 1294 ; « Interdire les pièges de régulation non-sélectifs », n° 1300), une a particulièrement retenu notre attention dans le contexte de l’actualité législative actuelle : il s’agit de la proposition de loi visant à interdire les euthanasies dites de convenance des chiens et des chats (n° 1299).
Cette proposition de loi vient à la suite du controversé article 27 de la loi dite Dombreval du 30 novembre 202144 qui crée l’article 522-1 nouveau du Code pénal : « le fait, sans nécessité, publiquement ou non, de donner volontairement la mort à un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, hors du cadre d'activités légales, est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende ». Nous avions alors dans ces colonnes exprimé nos doutes sur la réalité de l’application concrète d’un tel article45.
La présente proposition de loi entend lutter contre les euthanasies de convenance, c’est-à-dire les mises à mort d’un animal non justifiée par une décision médicale (le texte ne parle pas des décisions judiciaires, qu’il convient évidemment d’inclure). Aymeric Caron vise deux cas en particulier : d’une part, les euthanasies effectuées par les refuges et fourrières pour manque de place, surpopulations et questions économiques ; d’autre part, les euthanasies faites en cabinet vétérinaires par des praticiens peu scrupuleux du moment que leurs clients payent.
Si le but est louable, les moyens proposés semblent inadéquats : la stérilisation est imposée pour tout animal en fourrière, la question financière étant à la charge de la municipalité (en plus de celle de la stérilisation des chats errants imposée par la loi de 202146 et pour lesquelles les municipalités avaient tiré la sonnette d’alarme compte tenu de la diminution de leurs budgets). L’article 2 de la proposition de loi est encore plus radical : il impose la stérilisation de l’ensemble de la population canine et féline pour tous les propriétaires de France, à l’exception des éleveurs (c’est la fin des portée « sauvages » dans les familles), et sauf « si cette opération pose un risque pour la santé de l’animal ». Une contravention de 5ème classe accompagne cette obligation, afin de forcer les propriétaires récalcitrants.
Cette proposition de loi est étrange : qui avantage-t-on ? Le bien-être animal n’est-il pas un prétexte utilisé par des lobbys d’éleveurs (seuls désormais détenteurs du droit de reproduction des animaux) ou par des lobbys de vétérinaires (pour stériliser les 25 millions de chats et de chiens en France47) ?
Mais l’essentiel est sans doute ailleurs : à l’heure où la France débat de manière cruciale et douloureuse de la question de l’euthanasie, des soins palliatifs et de la fin de vie48, cette proposition de loi sonne mal. Est-il raisonnable de sanctionner l’euthanasie non justifiée pour les animaux d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 50 000 euros d’amende49 tout en prévoyant une peine de deux ans de prison et de 30 000 euros d’amende en cas d’entrave à l’euthanasie humaine ?50 Les questions financières qui sous-tendent l’euthanasie animalière ne seront-elles pas bientôt à se poser pour l’euthanasie humaine ? Ne souhaite-t-on pas refuser d’un côté ce que l’on veut autoriser de l’autre ? Comme toujours, les animaux -surtout de compagnie- agissent comme un miroir envers notre société humaine et la question de l’euthanasie animale nous renvoie à notre propre monde. Aimera-t-on plus Choupette que Mamie ? Voilà la vraie question.
Matthias MARTIN
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JORF n° 54 du 4 mars 2025, texte n° 3.
RSDA 1-2024.
JORF n° 83 du 9 avril 2024.
Cf. article L. 211-16 du Code rural et de la pêche maritime.
Cf. RSDA 1-2024, Chronique législative.
La dernière : Résolution du Parlement européen du 12 février 2020 sur la protection du marché intérieur et des droits des consommateurs de l’UE contre les conséquences néfastes du trafic d’animaux de compagnie [2019/2814(RSP)].
Study on the welfare of dogs and cats involved in commercial practices, Commission européenne, 2015: https://food.ec.europa.eu/system/files/2016-10/aw_eu-strategy_study_dogs-cats-commercial-practices_en.pdf.
EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments), 2023, «Scientific and technical assistance on welfare aspects related to housing and health of cats and dogs in commercial breeding establishments». EFSA Journal, 21(9), 1–105. https://doi.org/10.2903/j.efsa.2023.8213
Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes, modifiant le règlement (CE) nº 1255/97 du Conseil et abrogeant le règlement (CE) nº 1/2005 du Conseil (COM(2023) 770 final 2023/0448(COD))
Règlement (UE) 2016/429 du Parlement Européen et du Conseil du 9 mars 2016 relatif aux maladies animales transmissibles et modifiant et abrogeant certains actes dans le domaine de la santé animale (« législation sur la santé animale») (JO L 84 du 31.3.2016, p. 1–208).
Règlement (UE) nº 576/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013 relatif aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie et abrogeant le règlement (CE) nº 998/2003 (JO L 178 du 28.6.2013, p. 1).
Ibid.
Règlement (CE) nº 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes et modifiant les directives 64/432/CEE et 93/119/CE et le règlement (CE) nº 1255/97 (JO L 3 du 5.1.2005, p. 1).
Art. 3, point 5
Art. 3, point 4.
Art. 3, point 9.
Art. 3, point 10.
Art. 3, points 11 et 12.
Art. 4, point 27.
Article 84, tel que précisé par le RÈGLEMENT D’EXÉCUTION (UE) 2022/1345 DE LA COMMISSION du 1er août 2022 portant modalités d’application du règlement (UE) 2016/429 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne l’enregistrement et l’agrément des établissements détenant des animaux terrestres et procédant à la collecte, à la production, à la transformation ou au stockage de produits germinaux.
La procédure peut être suivie sur le site Internet du Parlement européen : https://oeil.secure.europarl.europa.eu/oeil/fr/procedure-file?reference=2023/0447(COD).
JORF n°0287 du 5 décembre 2024 ; texte n° 165
Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.
JORF n°0103 du 2 mai 2025, texte n° 33
JORF 1er déc. 2021, texte n° 1.
Art. L. 413-14 C. envir.
Art. L. 413-10 -I C. envir.
Art. L. 413-10 -II C. envir.
Art. L. 413-11 et L. 413-13 C. envir.
Voir notre chronique : « Le remake 2024 d’Il faut sauver Willy sera-t-il Bientôt Willy en sushi ? », RSDA 2-2024
JORF 2 mai 2025, texte n° 33.
Notamment aux règles de concurrence du marché commun, cf. le visa qui fait expressément référence aux art. 107 et 108 du TFUE ainsi qu’au décret n°2001-495 du 6 juin 2001 pris pour l'application de l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif à la transparence financière des aides octroyées par les personnes publiques.
Art. 1er du décret.
Sont visés uniquement les lions, tigres, léopards, hyènes ou loups ; art. 11 du décret.
La gestion administrative et financière de la mesure 5 est assurée par le service déconcentré dont relève le siège social de l'établissement itinérant de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques.
Art. 3 du décret.
Cf. art. L. 413-6 C. envir., et art. L. 212-9 et R. 212-15 CRPM.
Art. 17 à 21 du décret.
Art. 5 et 22 du décret.
Arrêté du 24 mars 2025 portant création de la réserve biologique dirigée (RBD) de la Haute Chaume (Oise) et approbation de son premier plan de gestion, JORF n° 0075 du 28 mars 2025, Texte n° 46 ; Arrêté du 24 mars 2025 portant modification de la réserve biologique de la Confluence Ill-Rhin (Bas-Rhin) et approbation de son plan de gestion, JORF n° 0075 du 28 mars 2025, Texte n° 47 ; Arrêté du 24 mars 2025 portant modification de la réserve biologique de la Sainte-Baume (Var) et approbation de son plan de gestion, JORF n° 0075 du 28 mars 2025, Texte n° 43 ; Arrêté du 24 mars 2025 portant modification de la réserve biologique dirigée (RBD) de Lacanau (Gironde) et approbation de son plan de gestion, JORF n° 0075 du 28 mars 2025, Texte n° 44 ; Arrêté du 24 mars 2025 portant approbation du plan de gestion de la réserve biologique dirigée (RBD) du Hochfeld (Bas-Rhin) , JORF n° 0075 du 28 mars 2025, Texte n° 45 ; Arrêté du 24 mars 2025 portant approbation du plan de gestion de la réserve biologique (RBD) du Stampfthal (Bas-Rhin), JORF n° 0075 du 28 mars 2025, Texte n° 44.
2025/0058 (COD).
Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, JO n° L 206 du 22/07/1992 p. 7 – 50.
Loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes.
Voir notre chronique : « "Animal joli, joli, joli, tu plais à mon père, tu plais à ma mère…", éléments de réflexion à propos de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 », RSDA 2/2021, p. 247 à 256
Art. 11 de la loi.
À noter que 50 % des chiens et 80 % des chats détenus sont déjà stérilisés ; https://www.i-cad.fr/articles/plus-de-la-moitie-des-fran%C3%A7ais-possede-un-chien-ou-un-chat (consulté le 2 juin 2025).
Le 27 mai 2025, l'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement, ainsi que la proposition de loi relative au droit à l'aide à mourir.
Nouvel art. L. 211-24 CRPM proposé.
Nouvel art. L. 1115‑4 CSP proposé.