Le porc : génétique, élevage et science
- Pierre Mormede
Docteur vétérinaire, docteur d'université. Directeur de recherche émérite
INRAE. Département de génétique animale, centre de recherches de Toulouse - Agnès Waret-Szuka
Maître de conférences en élevage et médecine des porcins
ENVT CIRAD UMR Astre
Origine
1. Le porc (Sus domesticus) est un mammifère artiodactyle (à nombre pair de doigts), monogastrique et omnivore, de la famille des suidés, comme le sanglier d’Eurasie Sus scrofa dont il dérive par domestication. Ces deux espèces peuvent se reproduire entre elles avec des descendants fertiles. Deux centres principaux de domestication du cochon sauvage ont été mis en évidence, en Chine il y a environ 9 000 ans et en Anatolie il y 6 000 ans. La domestication proprement dite a été précédée par une longue période de commensalisme1.
Génétique
2. Les deux espèces diffèrent par leur caryotype, 38 chromosomes (36 autosomes et 2 chromosomes sexuels) pour le porc domestique et 36 pour le sanglier, les chromosomes 15 et 17 étant fusionnés chez le sanglier. Leur croisement donne des descendants qui possèdent 36, 37 ou 38 chromosomes, ce qui permet de détecter les hybridations entre animaux sauvages et domestiques2. Le génome complet du porc a été publié en 20123. Il contient 2,6x10^9 nucléotides codant 21 640 gènes. Cette étude a montré que les populations de sangliers sauvages ont divergé entre 1,6 et 0,8 million d’années, ce qui explique l’importance des différences entre les porcs européens et asiatiques, en plus des divergences liées à des processus différents de sélection plus récents. Bien que la distance phylogénétique entre l’homme et le porc (97 millions d’années) soit plus importante qu’entre l’homme et la souris (91 millions d’années), la comparaison des génomes et de leurs expressions tissulaires montre que les deux espèces sont des modèles intéressants pour l’étude des bases moléculaires des maladies humaines4.
3. La filière porcine est organisée de façon pyramidale, avec des élevages de sélection génétique, peu nombreux (1 à 2 % de l’effectif total de truies), et des élevages de multiplication (5 à 7 % des truies), dont le renouvellement est assuré par des animaux issus des élevages de sélection, qui ont pour rôle de produire et de diffuser (avec les centres d’insémination porcine) les animaux améliorateurs nécessaires au renouvellement des élevages de production, dernier étage de la pyramide5. Quatre races représentent la très grande majorité des porcs de production, deux races sélectionnées principalement pour leurs qualités maternelles, le Large White (LW) et le Landrace (LR) et deux races sélectionnées pour leur conformation (le porc de Piétrain et le Duroc). Le principal schéma génétique de production des porcs charcutiers est un croisement à trois voies entre une truie croisée LW x LR et un verrat Piétrain ou Duroc pour apporter un taux de muscle plus élevé et une viande de qualité. Des races de porcs chinois, en particulier la race Meishan, ont été introduits dans les années 1980 pour mettre à profit son exceptionnelle prolificité et sa qualité de viande. Il existe de nombreuses variétés de ces races principales et autres lignées composites propres à chaque entreprise de sélection. Quelques races locales sont conservées (Porc Pie noir du Pays basque, Porc gascon, Porc corse…). Ces animaux sont élevés de façon extensive et fournissent de produits de qualité pour des marchés de niche.
4. Les critères de sélection ont beaucoup évolué6. Les premiers caractères pris en compte ont été la vitesse de croissance (+) et l’adiposité (-). Ainsi le gain moyen quotidien de poids est passé de 650 g/jour en 1986 à 800 g en 2016. À la fin du siècle dernier, l’efficacité alimentaire, la qualité des carcasses et de la viande ont été ajoutés, puis la taille des portées. Depuis le début du 20e siècle, des caractères dits « fonctionnels » – qui ne sont pas directement des caractères de production – ont été introduits dans les schémas de sélection. Ces caractères sont importants pour le bien-être des animaux, comme les aptitudes maternelles (survie des nouveau-nés), la longévité de truies reproductrices, la résistance aux maladies, la qualité des aplombs et plus globalement des caractères de robustesse, concept qui associe la capacité à maintenir un haut niveau de production et une bonne efficacité alimentaire sans dégrader la santé, le bien-être et l’aptitude à la reproduction des animaux. On voit donc la très grande diversification des caractères sélectionnés et la prise en compte de caractères fonctionnels de plus en plus complexes. À titre d’exemple, en 2023, une truie produisait en moyenne 13,2 porcelets sevrés par portée (+ 1,6 porcelet sevré en 10 ans), 25,3 porcelets par an (+ 12 % en 10 ans) et l’indice de consommation des porcs à l’engrais atteignait 2,76 kg d’aliment consommé par kg de gain de poids (- 3 % en 10 ans).
5. La sélection classique repose sur le calcul des différences de performances entre générations, les meilleurs animaux étant conservés pour la production de la génération suivante. Les connaissances sur le génome du porc ont permis de développer des tests moléculaires pour éliminer des tares génétiques présentes dans certaines races comme le gène de sensibilité au stress particulièrement fréquente chez le porc de Piétrain (gène HAL) ou un gène responsable d’un défaut de qualité de la viande (gène RN). La connaissance de la séquence et de la variabilité des génomes ainsi que le développement des techniques de génotypage à grande échelle permettant d’établir une carte d’identité des variations génétiques pour chaque individu ont ouvert la voie, au début du 21e siècle, à la technique dite de « sélection génomique ». Au lieu des sélectionner les animaux sur la base des caractéristiques phénotypiques des reproducteurs, cette approche vise à sélectionner directement les polymorphismes moléculaires favorables pour le caractère recherché. Il faut pour cela établir la carte génétique de chaque individu et calculer dans la population animale étudiée les corrélations entre la variabilité génomique et les caractéristiques phénotypiques. Il est alors attribué à chaque site variable (locus) du génome une valeur génétique dont la combinaison à tous les sites de variabilité analysés donne la valeur génétique globale de l’animal étudié en fonction des objectifs de sélection. La sélection des animaux est faite sur la base de leur carte génétique, qui permet de prédire (avec une marge d’erreur plus ou moins grande) leur profil phénotypique. Il est ainsi possible de prendre en compte des caractères plus nombreux, voire plus difficiles à mesurer, à condition d’en avoir étudié au préalable les déterminants génomiques. Cette sélection génomique est désormais utilisée pour la plupart des espèces domestiques et permet des ‘progrès’ génétiques beaucoup plus rapides que la démarche traditionnelle7.
Élevage de production
6. La viande de porc est la viande la plus consommée à l’échelle mondiale (à égalité avec les viandes de volailles) (36 % de la viande consommée par personne et par an). C’est aussi la viande la plus consommée en Europe et en France. Les caractéristiques biologiques de l’espèce rendent possible un coût de production bas. Ainsi, c’est par exemple, l’espèce dont la part consommable en pourcentage du poids de l’animal vif est la plus importante (83 % vs 61 % pour une vache allaitante)8. La Chine est le principal producteur de porcs (44,09%) devant l’UE (22,02%) qui est le principal exportateur et les Etats-Unis (11,66%). L’Espagne est le premier producteur de porcs en Europe depuis 2020 devant l’Allemagne et la France. En France cela représente 2 204 tonnes de viande de porc produite9.
7. La filière porcine française souffre d’une compétition généralisée et brutale. Par ailleurs les éleveurs n’ont pas la maitrise des prix auxquels leurs productions leur sont achetées. La baisse des coûts de production est donc pour eux une obligation. C’est ce qui a conduit à la prédominance du modèle de production standardisé, ultra-rationalisé et industrialisé que l’on connait aujourd’hui en France10. La logique de maitrise des coûts explique aussi la spécialisation des exploitations et leur concentration territoriale. Ainsi la Bretagne, 6 % de la SAU nationale concentre 56 % des porcs ou 450 porcs par km211.
8. La France est un pays de « naisseurs-engraisseurs » (44 %). L’éleveur naisseur-engraisseur fait naître les porcelets et les élève jusqu’à l’abattage, vers 115 kg de poids vif. Ces élevages comptent 203 truies en moyenne. Il existe aussi des élevages dits naisseurs qui feront naitre des porcelets pour les vendre au moment du sevrage, c’est-à-dire à la fin de la période d’allaitement par la truie, vers 8 kg ou après une période dite de post-sevrage à 30 kg. La période d’allaitement dure 3 ou 4 semaines en fonction de la conduite choisie par l’éleveur et celle de post-sevrage en général 6 semaines. Les animaux seront ensuite engraissés par des engraisseurs pendant environ 4 mois pour atteindre leur poids d’abattage.
9. Le modèle d’élevage prédominant dit ‘conventionnel’ est en bâtiment fermé avec un sol en caillebottis. Il existe par ailleurs une grande diversité d’autres systèmes dits ‘alternatifs’ qui se démarquent notamment par une volonté de mieux répondre au bien-être des animaux et par la production de produits plus qualitatifs. Ils relèvent souvent d’un cahier des charges spécifique correspondant ou non à un signe officiel de qualité et d’origine. On y retrouve des élevages de plein air mais aussi sur litière (paille, sciure…). En 2021, ces derniers ne représentaient que 5 à 10 % des élevages en France12.
10. Le système d’élevage actuellement majoritaire devient de moins en moins acceptable en lien avec l’évolution des valeurs socioculturelles à travers le monde. Le concept de bien être est au cœur des évolutions actuelles ; prise en compte du bien-être des animaux mais aussi de celui des éleveurs et de l’environnement avec le concept « One Welfare ». Dans ce cadre, sont remis en cause la conception de la conduite d’élevage en lien avec celle des bâtiments et notamment la restriction de mouvement des animaux, l’absence d’accès à l’extérieur et à la lumière naturelle, mais aussi des pratiques mutilantes pour les animaux.
11. La réglementation européenne et française a déjà amené à des changements majeurs dans les pratiques d’élevage. Ainsi, depuis le 1er janvier 2022, la castration chirurgicale à vif des porcelets males est interdite alors qu’elle paraissait jusque-là incontournable en raison du risque d’odeurs sexuelles de la viande. Pour ceux qui poursuivent la castration chirurgicale il s’agit de prendre en charge la douleur par anesthésie et analgésie. Il est aussi possible d’opter pour une castration vaccinale mais cela est très peu utilisé à l’heure actuelle en France (< 1 % des porcs mâles) au contraire du Brésil par exemple où cette pratique est largement répandue (> 80 % des porcs mâles)13. Les freins sont possiblement en lien avec une problématique croissante d’acceptation de la vaccination mais aussi avec une mise en pratique potentiellement complexe sur des porcs très lourds lors du rappel vaccinal. D’autres éleveurs ont opté pour un élevage de porc mâles entiers (28 % des porcs mâles produits en France) avec un tri à l’abattoir sur la base de la détection olfactive des carcasses odorantes. Cependant, les mâles entiers sont plus maigres et leurs carcasses se prêtent mal à certaines transformations (salaisons sèches). Ainsi l’adhésion de l’ensemble des professionnels de la filière, notamment de certains transformateurs, n’est pas toujours facile d’autant que cela implique un surcoût au niveau de l’élevage qu’il faut compenser.
12. La réglementation interdit aussi de couper la queue des porcs de façon systématique en routine (Directive 2008/120/CE). Celle-ci est pratiquée au cours des premiers jours de vie des porcelets par la majorité des élevages en Europe pour réduire le risque de caudophagie. Elle cause néanmoins des douleurs dans les jours qui suivent et qui peuvent être persistantes (Sandercock et al., 2016). La caudectomie ne peut donc en théorie être pratiquée que lorsque les moyens ont été pris en élevage pour éviter le déclenchement d’épisodes de caudophagie. Cependant, l’origine de la caudophagie étant multifactorielle et non totalement élucidée, il n’existe malheureusement pas aujourd’hui de solution à proposer aux éleveurs qui garantisse la réussite d’un arrêt de coupe de queue. Ainsi, la gestion au quotidien de porcs à queue non coupée apparait souvent complexe à mettre en œuvre malgré la prise en compte de nombreux facteurs de risque (gestion de la ventilation, quantité et composition de l’aliment, surface disponible, apport de matériau d’enrichissement de l’environnement…) et une surveillance importante des animaux14, ce qui rend l’application de la réglementation délicate.
13. D’autres évolutions réglementaires européennes sont attendues très prochainement. En ce qui concerne les truies et pour atténuer la majorité des conséquences négatives de l’élevage actuel, il s’agirait de leurs fournir plus d’espace en supprimant la contention en cage quel que soit leur statut gestationnel, en incorporant plus de fibres dans les rations et en apportant des matériaux de nidification en maternité15. Cela peut sembler simple mais soulève cependant plusieurs défis dont celui de bouchage des caillebottis et de gestion compliquée des lisiers. Ainsi, les besoins d’investissement à l’échelle de la ferme France, quand on associe plusieurs mesures, sont estimés à 10 milliards d’euros ou plus selon les scénarios retenus16. Ces études soulignent la nécessité d’accompagner financièrement et techniquement les éleveurs sur une période de transition qui pourra être importante.
14. Si les surcoûts associés à un accès à l’extérieur des animaux sont aussi de nature à augmenter fortement le coût de production des porcs avec un impact à la hausse plus ou moins fort sur les prix à la consommation, ils posent aussi des défis en termes sanitaires. Il est en effet moins facile de contrôler les interactions avec la faune sauvage dans ce type de configuration ou de gérer le parasitisme17. Par ailleurs, n’étant pas le système majoritaire, il peut y avoir une impression des acteurs concernés de non prise en compte de leurs contraintes lors de la formulation de certaines réglementations. Par exemple cela a été le cas au départ pour l’arrêté « biosécurité » qui s’est imposé aux élevages (tous les suidés, tous les détenteurs) suite à la réapparition en Europe de la fièvre porcine africaine (FPA). La FPA, maladie infectieuse virale hémorragique des suidés domestiques et sauvages n’est pas contagieuse pour l’homme. Sa survenue en France engendrerait néanmoins des pertes économiques majeures en raison de son taux de mortalité élevé et de restrictions commerciales imposées aux pays touchés. Par ailleurs, la confirmation d’un foyer de la maladie impliquerait un nombre potentiellement important d’animaux abattus afin d’éviter sa propagation, abattages sanitaires qui sont eux aussi de moins en moins acceptés par le grand public. Comme il n’existe à ce jour aucun vaccin ou traitement de la maladie, la solution de la prévention avec la mise en place de mesures de biosécurité s’est rapidement imposée. Il s’agit de « mesures de gestion et de mesures matérielles qui visent à réduire les risques d’introduction, de développement, et de propagation des maladies (i) à une population animale (à partir ou au sein de celle-ci), (ii) à un établissement, une zone, à un compartiment, à un moyen de transport ou tout autre site, installation ou local, à partir de ou au sein de celui-ci » (Loi de santé animale, règlement (UE) 2016/4292). Au-delà des défis techniques et financiers posés par les obligations de moyens dans des élevages ces mesures questionnent la perception des risques par les différents acteurs et la nature même de ce qu’on nomme « élevage ».
15. Les maladies porcines ne se limitent pas à celles qui sont réglementées et sont le plus souvent polyfactorielles. Elles sont dues à la conjonction de facteurs de risque multiples infectieux et environnementaux (bâtiment, conduite du troupeau…). La difficulté de leur gestion tient notamment au nombre d’animaux présents. Cela va impacter la facilité et la précocité de détection des problèmes mais aussi la présence de statuts différents des animaux et la facilité d’administration des soins. Des leviers incitatifs et réglementaires à l’échelle nationale ou européenne visant à la diminution de l’usage des antibiotiques (plans écoantibio), ainsi qu’au niveau de la filière et au niveau de l’élevage (respect des normes zootechniques, biosécurité, vaccinations…) ont permis de repenser et d’améliorer les modalités de gestion des pathologies. Ainsi entre 2010 et 2022, le Panel Inaporc rapporte une baisse d’utilisation de 77 % d’antibiotiques chez le porc et particulièrement en post sevrage qui était jusque-là le stade le plus consommateur. On note cependant un ralentissement de cette tendance car les marges de baisse semblent diminuer au fil du temps.
16. En conclusion, des améliorations non négligeables ont été apportées à l’élevage porcin ces quinze dernières années. Il n’en reste pas moins qu’il est aujourd’hui confronté à une crise majeure de légitimité environnementale, sociale et économique et doit évoluer en profondeur18.
Utilisation à des fins scientifiques
17. En 2023, 10 907 porcs ont été utilisés à des fins scientifiques, soit 0,5 % de l’ensemble des animaux utilisés à cette fin (2 046 754)19. Par comparaison, pendant cette même année, 22,25 millions de porcs ont été produits pour l’alimentation20. Le but de ces utilisations était la recherche fondamentale (1 804), la réglementation (1 124), la recherche translationelle pour améliorer la santé humaine (4 833), la préservation des espèces ( 5), la protection de l’environnement (72) et la formation (3 069)
18. Du fait de sa taille, de sa physiologie, de sa sensibilité aux maladies humaines, le porc est une espèce précieuse pour la recherche biomédicale où il est présent dans l’ensemble des disciplines21. Les porcs d’élevage peuvent atteindre à l’âge adulte 250 à 350 kg. Pour se rapprocher de la taille des humains ainsi que pour faciliter l’élevage et la manipulation des animaux, des races naines sont utilisées comme les porcs Yucatan ou Ossabaw pour l'étude des pathologies nutritionnelles (obésité, troubles digestifs fonctionnels, pathologies cardiovasculaires et maladies métaboliques)22. En outre, des lignées de porcs de petite taille (les mini-porcs) ont été développées à partir de races existantes et d’une sélection génétique pour une taille réduite. Différentes lignées ont été développées, comme le mini-porc de Göttingen dans les années 1960, qui pèse 35 kg à l’âge adulte.
19. Le porc est utilisé en chirurgie pour la formation des chirurgiens et pour la chirurgie expérimentale. Un domaine particulièrement actif est la recherche sur l’utilisation du porc comme donneur d’organes pour des xénogreffes chez l’homme, dans un contexte de pénurie mondiale d’organes, en raison de sa proximité morphologique et de sa disponibilité. « Le franchissement de la barrière interespèces dans le but de sauver une vie humaine pose autant de questions pour le donneur (le porc) que pour le receveur (l’humain) »23. Cette utilisation du porc comme source d’organes à visée thérapeutique pose encore un certain nombre de problèmes scientifiques, le rejet du greffon par la mise en œuvre du système immunitaire par l’organisme receveur, la transmission de pathogènes (en particulier des virus) et des problèmes de coagulation en raison de différences entre les deux espèces. La principale voie de recherche est fondée sur les techniques récentes d’édition du génome pour ‘humaniser’ les mécanismes de l’immunité responsables du rejet, associées à des traitements immunosuppresseurs classiques. Plusieurs entreprises produisent ainsi des lignées de porcs avec des modifications du génome de plus en plus nombreuses dont les organes (rein, cœur) sont utilisés à titre expérimental chez des primates non humains, mais aussi chez quelques rares patients humains, avec un succès encore limité24.
20. L’utilisation de porcs à des fins scientifiques est régie par les textes applicables à l’ensemble des animaux utilisés à des fins scientifiques (directive européenne 2010/63/UE et textes d’application dans le droit national). Tout projet est soumis à autorisation par le ministère chargé de la recherche après évaluation et validation par un comité d’éthique en expérimentation animale. Le comité vérifie que le projet est justifié du point de vue scientifique ou éducatif, ou requis par la loi ; que les objectifs du projet justifient l’utilisation des animaux ; que le projet est conçu pour permettre le déroulement des procédures expérimentales dans les conditions les plus respectueuses de l’animal et de l’environnement. Finalement, le comité fait une analyse comparative des dommages et des avantages du projet, visant à apprécier si la souffrance, la douleur et l’angoisse potentiellement infligées aux animaux sont justifiées par les résultats escomptés au bénéfice de l’homme, des animaux ou de l’environnement.
Conclusion
21. Le porc occupe une place à part parmi les animaux domestiques. Il partage une proximité physiologique avec les humains sans qu’il soit trop proche au niveau émotionnel pour permettre son exploitation pour notre alimentation et pour son utilisation à des fins scientifiques, essentiellement pour les progrès de la santé humaine. Son utilisation à des fins scientifiques est régie par des textes exigeants pour la protection des animaux et de réels progrès sont réalisés pour sa protection en élevage, même s’il reste encore du chemin à parcourir pour parvenir à son réel bien-être.
Mots-clés : porc ; génétique ; élevage porcin ; science
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